Variations de la névrose type

Partons de l’enseignement de Jacques-Alain Miller : « la chute des idéaux et des universaux a commencé pour Lacan à partir de la sexualité féminine. »[1]
Et retrouvons la névrose obsessionnelle, dont on n’est toujours pas parvenu à donner une « synthèse cohérente de toutes ses variations »[2], un siècle après Freud, incarnant d’autant mieux l’essence qui la fonde, à savoir une question – jusqu’à, peut-être, d’obsession n’en porter que le nom. Le « désordre croissant de la sexuation »[3], tel que mis en avant par J.-A. Miller, pourrait constituer un outil nécessaire à réordonner les logiques de la position sexuée des individus dans le lien social, et de fait, dans ce qui fait structure et symptôme. Car c’est la position féminine qui apparaît sous un jour nouveau au cours du siècle dernier, non pas en reste, mais en exergue. Dès lors, pourrions-nous aller jusqu’à penser un remodelage des structures – si structure il y a – telles que nous avons pu les penser et nous en passer pour mieux nous en servir ? Si c’est le cas, à la fameuse interrogation lacanienne : « Qu’est-ce qu’une femme ? »[4]
Nous y adjoindrons : « Qu’est-ce qu’une femme obsessionnelle ? » ; et, comment pourrait-elle venir à subvertir une entité si solidement ancrée ? Car la norme-mâle contemporaine ne peut se penser sans la supplémentation de son au-delà offrant au sujet féminin, et peut-être – dans le principe de dialecte que l’on doit à Freud – à chaque sujet, une variation au sein du leurre nécessaire de la structure. Aussi, la liberté féminine ne serait-elle pas la clé de cette énigme névrotique si difficilement résorbable, laissant les classifications en reste ; pour le pire de l’universalisation, mais pour le meilleur de la singularité ? Et en conservant son statut privilégié de question, la névrose emprunte les voies d’une logique laissant place à l’invention quant à la distance à prendre avec le fantasme, pour ainsi en offrir une déclinaison d’autant plus infinie.
[1] Miller J.-A., « L’orientation lacanienne : L’Être et l’Un », enseignement prononcé dans la cadre du département de psychanalyse de l’université de Paris VIII, leçon du 25 mai 2011, inédit.
[2] Freud S., Inhibition, symptôme, angoisse, Paris, PUF, 1933, p.33.
[3] Miller J.-A., « le réel au XXIème siècle. Présentation du thème du IX Congrès de l’AMP », La Cause freudienne, Paris, Navarin, n° 82, octobre 2012, p.94.
[4] Lacan J., le Séminaire, Livre IV, la relation d’objet, Paris, Seuil, 1994, p.141.